Accueil » LA DREPANOCYTOSE : UNE FATALITÉ ?

LA DREPANOCYTOSE : UNE FATALITÉ ?

Par Ornella Sabi

Sommaire

La drépanocytose Qu’est-ce que c’est ?

La drépanocytose est une maladie génétique héréditaire qui se caractérise par une déformation de l’hémoglobine, composant principal des globules rouges (ou hématies ou érythrocytes). Les globules rouges sont des éléments circulant dans le sang, qui en plus de lui donner sa couleur rouge, ont la lourde charge de transporter les gaz respiratoires notamment l’oxygène et le gaz carbonique. Et ils assurent cette fonction via l’hémoglobine qui les constitue. Normalement, les globules rouges ont une forme arrondie comme un disque, avec un centre creux et fin (biconcave), ce qui leur donne une grande élasticité, leur permettant de passer aisément dans les vaisseaux sanguins lors de leur mission de transport. Mais dans la drépanocytose, ils sont déformés et prennent une forme de faucille. Ils ne circulent plus donc facilement dans les vaisseaux sanguins, peuvent s’entasser et entraîner des caillots, bloquant ainsi la circulation sanguine. 

Qu’est ce qui cause cette maladie ?

La cause de la drépanocytose est génétique. Il s’agit d’une mutation du gène qui code pour la formation de l’hémoglobine. Ce gène n’est pas lié aux chromosomes sexuels X ou Y, et donc se transmet à la descendance masculine comme féminine. La drépanocytose est donc une maladie génétique héréditaire autosomique et récessive, c’est à dire que pour qu’un enfant puisse manifester la maladie, il faut qu’il reçoive forcément une paire du gène muté, l’un provenant du père et le deuxième de la mère. En d’autres termes les deux parents doivent être porteurs du gène muté. Si l’enfant ne reçoit qu’un seul gène muté provenant soit du père, soit de la mère, il ne manifestera pas la maladie mais sera plutôt un porteur sain du mauvais gène, qu’il pourra transmettre à son tour à sa descendance. C’est pour cela que l’électrophorèse de l’hémoglobine fait partie du bilan prénuptial.

Comment savoir qu’on a la drépanocytose ?

Le dépistage de la maladie se fait par un examen sanguin : l’électrophorèse de l’hémoglobine. C’est un examen qui permet de mettre en évidence un taux élevé d’hémoglobines anormales après prélèvement d’un échantillon du sang de la personne. De cet examen, plusieurs profils peuvent en ressortir : ( A est le gène normal, S et C les formes anormales) 

  • AA: personnes non atteintes de drépanocytose et ne présentant aucun gène muté.
  • AS:  personnes portant un seul gène muté et ne manifestant pas en général la maladie. Cependant un parent AS peut avoir un enfant drépanocytaire si l’autre compagnon a également un gène muté dans son génotype.
  • SS: drépanocytose homozygote. La personne possédant ce génome a les deux gènes mutés, et manifeste donc les symptômes de la maladie. La forme SS est la forme la plus grave.
  • SC: une forme de drépanocytose hétérozygote moins répandue et moins sévère. 

Quand se manifeste la maladie ?

Chez les personnes atteintes, la drépanocytose se manifeste en général dès le bas âge. En effet, les signes peuvent survenir dès l’âge de 6 mois, mais le pic de fréquence se situe entre 5 et 15-20 ans, et peuvent persister après 20 ans.  Les nouveau-nés et les nourrissons de moins de 06 mois sont généralement asymptomatiques car ils bénéficient encore de la présence d’hémoglobine fœtale, une forme d’hémoglobine produite chez le fœtus durant la grossesse, qui n’est pas mutée. Elle disparaît malheureusement par la suite, au profit de l’hémoglobine anormale.

Comment se manifeste la maladie ?

Les trois principaux signes les plus fréquents de la drépanocytose sont :

L’anémie chronique 

  • Elle se traduit par un ictère (coloration jaune des yeux, muqueuses et peau), une fatigue ou faiblesse générale à laquelle les malades s’adaptent assez souvent.
  • En cas d’anémie sévère: s’ajoute un essoufflement, un battement des ailes du nez, une accélération des battements du cœur.

Les crises vaso-occlusives 

  • Douleurs brutales (dues au fait que les globules rouges malformés bouchent les petits vaisseaux créant un défaut d’apport d’oxygène et de nutriments aux organes)
  • peuvent durer quelques heures à quelques jours, voire même plusieurs semaines.
  • Siège : le plus souvent au niveau des os, articulations, pieds, mains, thorax, ventre, cerveau
  • Au niveau des pieds et des mains : c’est l’apanage des enfants de moins de 2 ans, et se traduisent par des gonflements des pieds et des mains qui sont chauds et douloureux.
  • Au niveau du ventre : se manifestent par des maux de ventre plus fréquemment observés chez les enfants, avec gonflement du ventre (hépato-splénomégalie).
  • Au niveau du thorax : Les douleurs s’accompagnent de gêne respiratoire, toux.
  • Au niveau du cerveau : la crise se traduit par des maux de tête, des troubles neurologiques, des pertes d’attention avec difficulté d’apprentissage, parfois même des paralysies d’une partie du corps avec séquelles.
  • Les facteurs qui favorisent la crise : la déshydratation, la chaleur, les efforts intenses, le froid, le stress, les infections.

Grande sensibilité aux infections 

  • Les personnes souffrant de drépanocytose, surtout les enfants de moins de 5 ans, sont particulièrement sensibles aux infections : infections respiratoires (pneumocoques++, grippe), infections urinaires, infections des os, hépatites virales, méningites…
  • Une température supérieure à 38,5°C chez un enfant drépanocytaire doit alerter : consultation en urgence.

Comment prévenir les complications de la drépanocytose?

La prévention des complications de la drépanocytose repose sur :

  • un suivi médical régulier (au moins 1/an chez les adultes et tous les 3 mois chez les enfants).
  • Une vaccination à jour
  • Une bonne hydratation (au moins 1,5L d’eau/jour pour un adulte, entre 1 à 2L d’eau/jour pour un enfant), pour prévenir la survenue de crises vaso-occlusives
  • L’éviction des autres facteurs favorisant les crises vaso-occlusives
  • Une bonne hygiène de vie
  • La prise quotidienne d’acide folique pour éviter l’aggravation de l’anémie

Aussi, les malades adultes et les parents d’enfants drépanocytaires sont sensibilisés à consulter en urgence en cas de signes d’alerte :

  • Douleurs rebelles aux traitements classiques (paracétamol, par exemple) ;
  • Fièvre supérieure à 38,5°C ;
  • Augmentation soudaine du volume du ventre;
  • Érection qui persiste ;
  • Gêne respiratoire soudaine ;
  • Vomissements répétés ;
  • Maux de tête soudains et violents ; difficultés à parler, troubles de la vision; troubles soudains de l’équilibre ;

Traitement ?

Il n’existe aucun traitement pour rendre normal un gène muté et donc aucun traitement curatif pour la drépanocytose. Il n’existe que des traitements symptomatiques pour soulager les malades :

  • Pour la douleur : des antalgiques dont les paliers sont fonction de l’intensité.
  • En cas d’infections : antibiotiques adaptés
  • Si anémie sévère : transfusion sanguine
  • Parfois des anticoagulants ou des vasodilatateurs peuvent être nécessaires
  • La greffe de moelle osseuse est réservée aux formes très sévères de drépanocytoses. 

Conclusion

 Les crises drépanocytaires peuvent être tellement récurrentes et intenses qu’elles peuvent empêcher le drépanocytaire de mener une vie normale et de vaquer librement à ses occupations. Ces personnes doivent avoir un suivi régulier avec un spécialiste.

Cependant, Le meilleur remède contre cette maladie est la prévention.  Avant de dire oui à votre charmant compagnon, faites-vous dépister tous les deux: Amour oui mais électrophorèse de l’hémoglobine d’abord.

À voir aussi